L’homme a l’air de réciter de la poésie, mais tout monte à ses lèvres comme enfanté dans l’instant. Il parle de Dieu, et Dieu n’est pas dans sa bouche une figure à craindre et à révérer, mais un infini cortège de visages, de femmes et d’hommes, d’enfants et de bêtes. Il passe au-dessus du désert, s’étend hors de la fournaise millénaire que parcourent encore les bédouins et se répand. Il affecte la forme du djinn ou de l’éfrit, et celles de tous ces diables d’avant l’Islam, qui n’en étaient pas, et qui disaient au contraire (et disent encore à ceux qui savent entendre les vers presque oubliés des pasteurs arabes) que la pierre, le sable, le mirage sur l’horizon, sont vie et divin et, de même, ensemble et uniques pourtant dans leur beauté, l’œil cerné de noir de la mère dont on ignore parfois s’il est orage ou velours, la main crevassée du père où se lisent les jours, ceux passés au loin avec les caravanes, et le chien qui se dresse tout à coup au bord du bivouac pour respirer, son museau trempé dans l’encre crépuscule, le vent qui tombe des étoiles.

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