Dehors pourtant, tout empirait, l’été comme le virus. Les souvenirs des malades s’asséchaient et s’envolaient en poussière. Il mourait toujours plus des gens dans les derniers hôpitaux. Les médias, prenant le relais des factcheckers de l’Infrazone, avançaient que des mutations avaient déjà entraîné l’apparition de nouvelles souches agressives.

On témoignait de scènes à peine croyables que la rue relatait dans ses conversations : hystéries, parfois collectives, comme lors des prières du vendredi, comportements singuliers de certains malades que l’on avait surpris en pleine glossolalie, récurrence d’éléments lexicaux religieux qui rattachaient le phénomène à une forme de mysticisme syncrétique, où les saints, les anges et les esprits du désert et de la steppe se mêlaient dans une exultation qui s’achevait en catatonie ou par la mort du sujet.

Les patrouilles de la FIP avaient arrêté aux portes de La Marche des groupes de malades en fuite. Ils s’étaient battus comme des diables pour ne pas être ramenés à Amman. Ils hurlaient leur désir d’être lavés dans les eaux du Jourdain. Ils hurlaient des mots de prophètes et c’était, dans la bouche de l’enfant comme dans celle du vieux, les mêmes paroles possédées qui coulaient de leurs lèvres et se répandaient partout comme une eau de baptême.

« Virus linguistique » hasarda un spécialiste, qui ne savait plus très bien s’il servait encore à quelque chose.

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